Le Christ de Verdun

 

Seul. Seul et nu. Transi par le froid,

par quoi d'autre? Il n'ira pas

plus loin. Ici ne s'ouvre à la terre

 

aucun horizon. Ce qui reste des arbres,

un tronc peut-être, sert d'entrave

ou d'appui pour repousser la chute.

 

L'écorce et la peau rongées, trouées,

le supplice identique. Rien ne l'arrête.

Depuis longtemps la sève a disparu,

 

La chair est presque exsangue. En bas,

ces cranes, ces mâchoires béantes,

la mort les exige anonymes.

 

Mourir ne suffit pas. Il faut encore

prendre part à son œuvre, planter

des croix, torturer, massacrer,

 

avant que se répande à perte de vue

la vraie nuit, le mal, l'injustifiable.

Mais lui, refuse de se taire. Quelle parole

 

rendrait un sens à la détresse

un espoir même obscur? Il l'annoncerait,

ce serait en vain. S'il crie, sera-t-il entendu?

 

De tout le corps, jusqu'au dernier souffle,

réunir les forces, membre après membre

qui se tordent, se raidissent, s'étirent,

 

Il redresse la tête, il se détourne,

et ce n'est pas assez. S'arracher à l'horreur

enfin, dans l'essor entrevoir une lumière,

 

les bras d'un crucifié comme des branches,

comme des ailes, se tendront à se rompre

puisqu'il n'y a personne à implorer.

 

Si tu partais, nous serions plus seuls et plus nus.

 

Pierre DHAINAUT

GRAVELINES,    MUSEE DU DESSIN ET DE L'ESTAMPE ORIGINALE

©

 
     
     
     
     
     
     
     
     
 

 

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"Le Christ de Verdun", 1970  (Bronze à la cire perdue/ Fonte J Roulland/  Collection  privée)

 
 

Vidéo:   http://youtu.be/2oh2L1UHdFY